Atelier: Journée d’été d’EELV

 

Jeudi, 22 Aout à 16 :00 à l’Université Marseille Saint-Charles.

Intervenants :

Brice Nzamba et Benjamin Moutsila (Congo-Brazzaville),
Raimundo Ela Nsang (Guinée équatoriale),
Patrick Lola (Cabinda),
Régis Essono (Gabon),
Ruffin Mpaka (province du Bas-Congo, RD Congo)
Discutant/es :

Kalliopi Ango-Ela (Sénatrice des Français Etablis Hors France. Membre de la commission des Affaires Etrangères, de la Défense National et des Forces Armées ),
Alexis Frémeaux (Conseiller Spécial du Ministre délégué chargé du Développement)

Animation :

Benjamin Bibas (co-responsable groupe Afrique EELV)

INTERVENTION DE RAIMUNDO ELA NSANG

conferencia

Comment envisagez-vous la transition politique et écologique à l’horizon 2016 ?
L’horizon 2016 est un mirage. Comment pourrait-on se fier à la date fixée par un dictateur qui n’a cessé de tout mettre en œuvre pendant plus de trente ans pour se maintenir au pouvoir. Il n’y a rien à attendre du régime d’Obiang et son clan qui a jeté la Guinée équatoriale dans une impasse.
Comme je viens de l’expliquer, sous la présidence d’Obiang, la situation politique n’a fait que se dégrader. Si rien n’ai fait, tout indique qu’en 2016, les élections, comme les précédentes, perpétueront ce régime, soit en offrant un nouveau mandat à Obiang, soit en permettant à l’un de ses fils ou à un autre baron du régime de lui succéder.
En réalité il n’existe que deux alternatives :
1. La première est la continuation de ce régime
En examinant l’histoire, on constate que par deux fois, ce régime aurait pu s’effondrer.
La première fois, juste après le coup d’Etat de 1979. Malgré leur implication dans la première dictature, Obiang et d’autres proches de Macias sont parvenus à duper la Communauté internationale et à obtenir des aides sans lesquelles ce régime n’aurait pu s’installer durablement.
La deuxième fois, au début des années 90, lors des accords de la Baule. Avec l’instauration du multipartisme et la création de partis d’opposition, le régime a bien failli être rejeté par le peuple qui avait l’occasion de s’exprimer par la voie démocratique. Toutefois, avec la découverte du pétrole et avec l’afflux des pétrodollars sur les comptes en banque des caciques du pouvoir, le régime a pu rapidement s’affranchir de la tutelle des pays occidentaux et de leurs exigences en matière de démocratisation et de respect des droits de l’Homme. Les partis d’opposition ont été réprimés ou interdits et l’ouverture annoncée a disparu dans la violence et le sang.
Par ailleurs, Obiang est parvenu à mettre sur pied un système organisé d’abus de toutes sortes et de pillage des ressources naturelles et il a impliqué dans ce système d’autres nations afin de les réduire au silence face aux nombreuses transgressions des droits et des libertés des citoyens équato-guinéens. A tel point que des Occidentaux sont régulièrement spoliés en Guinée équatoriale, et même arrêtés, passés à tabac, sans que cela provoque la moindre réaction de la part des gouvernements de leurs pays.

Toutefois, même si l’horizon 2016 n’est qu’un mirage de plus, il se pourrait que cette date devienne le 3e cap difficile à surmonter pour la dictature équato-guinéenne. Le président Obiang est âgé de 71 ans et sa santé est fragile, on le dit déjà à la recherche de son successeur. Depuis des longues années, le dauphin pressenti était Teodorin Nguema Obiang Mangue, le premier fils qu’Obiang a eu avec son épouse Constancia Mangue Okomo. L’affaire des BMA, la saisie de ses biens à Paris et le mandat d’arrêt international qu’a lancé contre lui la justice française ont eu un effet pervers, totalement inattendu, en créant des confrontations au sein du clan au pouvoir entre la Première Dame, les autres membres de la famille et les barons du régime qui reprochent à Teodorin son caractère instable.
A Teodorin, les barons du régime comme les acteurs économiques (notamment les compagnies pétrolières américaines) lui préfèrent un autre, lui aussi fils d’Obiang, l’actuel ministre des mines et de l’énergie, Gabriel Mbega Obiang. Plus discret que Teodorin, il donnerait mieux une image plus proprette et plus présentable de ce régime, même si, finalement, il a bénéficié autant que son frère de la corruption et des extorsions du régime.
Un autre scénario est toutefois envisageable, avec l’accession au pouvoir un autre membre du clan de Mongomo n’appartenant pas à la famille Obiang, mais qui perpétuerait ce même régime.
Quelque soit l’issue de cette crise dynastique, il est évident que la destruction du pays se poursuivrait alors jusqu’à l’épuisement des réserves pétrolières et le peuple équato-guinéen se retrouverait dans une situation pire qu’avant le pétrole.

2. La deuxième alternative est la rupture avec le régime du président Obiang
C’est uniquement dans ce cas de figure qu’on pourrait espérer une transition politique et écologique.
Mais pour que cela puisse avoir lieu, les pouvoirs politiques des puissances occidentales, notamment les Etats-Unis, la France, l’Espagne et l’Union européenne doivent sortir du silence face aux nombreuses transgressions des droits et des libertés des citoyens équato-guinéens et soutenir l’opposition comme au début des années 1990.

Malgré la difficulté de construire une opposition unifiée, malgré le vide politique créé par 44 ans de dictature, il y a en Guinée équatoriale des activistes politiques, des intellectuels et des artistes engagés et de jeunes citoyens qui aspirent au changement. La population commence à se mobiliser et à travailler avec les anciens opposants. Les conditions sont favorables à une union des forces de l’opposition. Comme ce fut le cas lors des « printemps arabes », Internet et les réseaux sociaux jouent leur rôle d’instrument véhiculaire des idées et des aspirations, et c’est précisément pour cette raison que depuis les dernières élections le régime d’Obiang a bloqué l’accès à Facebook et aux sites web de la CPDS et de l’opposition en exil.
Ces forces d’opposition, vives, mais encore désorganisées, recherchent l’appui de la communauté internationale, de ses institutions, de sa presse internationale, etc, afin de rompre l’isolement dans lequel le pouvoir essaie de les cantonner.
L’opposition et le peuple de la Guinée Equatoriale n’a pas des moyens pour combattre seul ce système.
La Guinée Equatoriale pose la question des Etats occidentaux veulent adopter dans leurs relations avec l’Afrique : Soutenir des hommes forts, généralement des militaires, pour assurer la paix sociale et garantir les profits réalisés par leurs entreprises, même si cela conduit à l’asservissement des peuples ; ou bien favoriser l’émergence de vraies démocraties en condamnant plus énergiquement les crimes commis durant ces 34 dernières années et dont la liste ne cesse de s’allonger : assassinats, arrestations et détentions arbitraires, recours habituel à la torture et aux traitements dégradants, corruption à tous les étages du pouvoir, détournements de l’argent public, non respect des engagements internationaux tels que le pacte international des droits civils et culturel.

Pourtant, les prises de position des démocraties occidentales font de l’effet à Malabo. Quand récemment le chef du gouvernement britannique David Cameron a fait allusion à la Guinée équatoriale comme exemple de mauvaise gouvernance, le gouvernement de la GE s’est senti obligé de publier un communiqué.

Avec un traitement similaire à celui que l’Union européenne et les Etats Unis ont réservé au régime de Mugabe, le régime d’Obiang pourrait s’effondrer comme un château de cartes.

Je termine en dénonçant que l’opposante politique Clara Nsegue Eyi est retenue en prison depuis plus d’un mois sans inculpation ni procès, pour avoir tenté de manifester une semaine avant les élections des 26 mai dernier. Aujourd’hui, le gouvernement équato-guinéen refuse à la jeune femme, atteinte d’un cancer du sein, une hospitalisation pourtant nécessaire.
Et en rappelant que dans ces même dates, le 21 aout 2010 quatre hommes (José Abeso Nsue, Manuel Ndong Anseme, Alipio Ndong Asumu et Jacinto Michá), qui s’étaient réfugiés au Bénin depuis plusieurs années, avaient été enlevés par les forces de sécurité équato-guinéennes étaient exécutés, immédiatement après avoir été déclarés coupables par un tribunal militaire de la capitale Malabo.

My beautiful picture
Kalliopi Ango-Ela (Sénatrice ) et Raimundo Ela Nsang(MRD)

My beautiful picture

Groupe Afrique d’EELV

My beautiful picture

Raimundo Ela Nsang (MRD) et Nicole Kiil-Nielsen (Députée Européenne)

Laisser un commentaire